La littérature jeunesse au Québec

Les animaux font toutes sortes de choses ! Ils se cachent, rôdent, guettent, frétillent, glougloutent, serpentent, gigotent et se perchent. Les enfants, tout comme les animaux, jouent eux aussi. En fait, tout le monde joue ! Du moins, tant qu’il leur reste de l’énergie ! Écrit et illustré par Julie Flett, Tout le monde joue est un album qui peut sembler simple de prime abord. Chaque double page présente des animaux, ainsi que deux verbes d’action. De temps à autre, un groupe d’enfants surgit et est montré en train de pratiquer une activité. Mais à la toute fin du livre, l’autrice et illustratrice de la nation crie présente la liste des animaux qui se trouvent dans l’album, avec la traduction en langue crie, au singulier, au pluriel, ainsi que le nom des petits de chaque espèce. Elle explique également les 17 sons uniques, à l’orthographe romaine normalisée, de la langue crie. De quoi relire l’album d’un tout nouvel œil. Une magnifique introduction à la langue crie et aux animaux du Québec et du Canada, à découvrir absolument !

On pourrait croire que Lolo est un garçon ordinaire. Pourtant, c’est un superhéros ! Bon, pas du genre avec une cape, un déguisement ou des collants. Mais un vrai de vrai superhéros ! Son pouvoir ? Son immense gentillesse, qu’il met au service des gens dans le besoin. Ça tombe bien, un dragon incapable de cracher du feu a besoin de lui ! Lolo ne ménagera aucun effort, ni aucune stratégie, pour parvenir à redonner le feu (sacré ?) au dragon. Mais c’est plus facile à dire qu’à faire... La soupe aux allumettes est une histoire d’amitié, une ode à l’imagination des enfants que nous proposent Patrice Michaud et Guillaume Perrault. Impossible de ne pas sourire devant les péripéties de Lolo et du dragon, alors que l’auteur fait montre d’un humour qui fait mouche, et que l’illustrateur s’amuse à cacher mille et un détails dans ses illustrations, dont certains clins d’œil à ses œuvres antérieures. Un album à lire en famille pour rigoler tout le monde ensemble !

Une enfant raconte la maladie de sa mère, mais aussi les voyages qu’elles font toutes les deux, le temps qu’elles passent ensemble et l’amour que l’enfant éprouve pour sa mère malgré la maladie et les changements (piqûres d’aiguilles sur les bras, perte de cheveux) physiques qu’elle apporte. Ensemble nous voyageons est un album poétique écrit par Lula Carballo et Catherine Anne Laranjo, avec des illustrations en broderies réalisées par Kesso. La maladie d’un parent est rarement abordée en littérature jeunesse, et pourtant, c’est une réalité à laquelle sont confrontés de nombreux enfants. Les autrices parviennent à traiter de cette thématique sensible et difficile avec bonté et espoir, au gré de l’imagination de l’enfant, qui transforme sa mère, ou qui se métamorphose elle-même en toutes sortes de choses. Les broderies de l’illustratrice, quant à elles, apportent une touche de douceur et de naïveté au texte empreint d’espoir et d’amour. Une œuvre unique, qui s’apprivoise au fil des relectures.

Pouleville est un village bien particulier. Pas parce qu’on y retrouve beaucoup de poules, non. Plutôt parce que ces poules y sont traitées comme des reines. Ou plutôt, comme des coqs en pâte ! De plus, chaque année a lieu le concours de la Plume d’Or, qui cherche à couronner la meilleure poule de tout Pouleville, celle qui se distingue de toutes les autres. Or, à la veille du concours, une série d’enlèvements de poules sème la panique dans le village. Les seuls indices ? D’étranges traces de pas, une silhouette inquiétante, des griffures et des touffes de poils roux… Heureusement, mademoiselle Courteplume, la sorcière du village, a un plan ! Écrit et illustré par Albert Arrayàs, Le mystère de Pouleville est un album qui mêle intrigue policière et humour. La chasse aux indices semble mener vers un seul suspect, et l’identité de celui-ci ne semble faire aucun doute, jusqu’à la chute de l’album, aussi drôle que surprenante. Après tout, il ne faut pas se fier aux apparences, mais plutôt se demander : à qui profite le crime ?

En revenant de la garderie, Caillou demande à son papa s’il peut jouer sur la tablette. Son père accepte, à la condition qu’ils jouent ensemble, mais seulement pour quinze minutes. Une fois le délai passé, le papa de Caillou l’invite à jouer à un jeu avant de lui lire un livre sur les pompiers. Caillou est très content d’avoir pu jouer sur la tablette et il a hâte au lendemain pour s’amuser de nouveau avec celle-ci. Dans Caillou . Les écrans, Christine L’Heureux et Kary proposent une histoire pour les tout-petits, afin d’aider les parents à bien gérer l’utilisation d’appareils électroniques et leur utilisation avec les jeunes enfants. Sans jamais tomber dans la morale, l’auteure présente plutôt une manière saine et positive d’intégrer la tablette à la routine, tout en mettant des limites claires et faciles à comprendre pour les enfants. Le personnage de Caillou, tel que mis en images par Kary, est attachant et permettra aux jeunes enfants de s’identifier à lui. Voilà un album tout indiqué pour aider les parents à faire l’éducation numérique de leurs enfants !

Un petit garçon raconte à son futur petit frère ou sa future petite sœur à quel point il a hâte à son arrivée. Tour à tour, il explique ce que lui disent tous les membres de sa famille au sujet du nouveau bébé et, chaque fois, il se prépare en conséquence. Puis un jour, ses parents se rendent à l’hôpital pour l’accouchement. Pourtant, lors de leur retour, ils sont seuls. Ils expliquent alors au garçon que le bébé est mort à la naissance. Comment surmonter un tel chagrin, alors que le narrateur aimait déjà ce petit frère ou cette petite sœur ? Andrée-Anne Cyr et Bérengère Delaporte abordent avec douceur et sensibilité la thématique du deuil périnatal dans Je t’aimais déjà, un album touchant et bouleversant. Bien que peu fréquente, la mort périnatale est un événement qui peut survenir sans qu’on s’y attende. Et lorsqu’il y a un enfant plus âgé à la maison, il peut être difficile de lui expliquer la situation dans des mots qu’il peut comprendre. Heureusement, l’autrice parvient à mettre des mots sur les sentiments du jeune garçon, mais aussi de son entourage. De son côté, l’illustratrice montre, grâce à des illustrations au trait enfantin, les préparatifs du garçon qui attend le nouveau bébé, puis le choc à la suite de l’annonce du décès périnatal, qui recouvre les couleurs d’un voile sombre qui symbolise le deuil et le chagrin. Puis, lorsque le temps fait son œuvre, les couleurs reviennent, alors que le garçon garde une place à ce bébé aimé et attendu dans son cœur. Une œuvre essentielle et magnifique, pour aborder un sujet délicat et sensible.

Oh, un œuf ! Et si tu cognais dessus, pour voir ? Oups ! Tiens, un tube de dentifrice. Et si tu le tapais avec ton poing ? Oups ! Oh non, un vilain moustique ! Allez, ferme le livre pour l’écraser ! Oups… Oups ! est un album tout-carton de Pascale Bonenfant, avec des illustrations de Julie Massy. Chaque double page est une invitation à faire une bêtise, alors que la conséquence, toujours rigolote, est présentée sur la double page suivante. Plus qu’un simple album, c’est un livre jeu, du type « avant/après » que nous proposent l’autrice et l’illustratrice. Avec ces bêtises à recommencer encore et toujours, il y a fort à parier qu’il remportera un franc succès auprès des tout-petits… Oups !

C’est le printemps à Vienne et Minime la souris en profite pour sortir. Elle veut sentir le soleil sur sa peau et le doux parfum de l’air. Mais qui est ce drôle de monsieur qui lit des poèmes et écrit de la musique sur un coin de nappe ? Ana Gerhard nous propose Curieux comme un petit chat ! Franz Schubert, un conte illustré par Marie Lafrance, avec une narration assurée par le comédien Benoit Brière et une prestation musicale de Musici de Montréal. L’autrice nous convie à la rencontre de Franz Schubert, compositeur viennois de la période romantique, alors qu’il compose son « Quintette de la truite », l’un de ses lieder les plus connus. L’album peut se lire seul, comme un conte, mais il gagne à être accompagné de la narration toute en finesse de Benoit Brière, ainsi que par la touche musicale de I Musici de Montréal, qui donnent vie à l’œuvre de Schubert. L’ensemble constitue une introduction accessible à la musique classique, qui plaira autant aux enfants qu’aux parents, mélomanes ou pas.

Ils sont quatre amis qui ne se quittent jamais. Il y a Babi, la plus grande ; Mini, la plus petite; Bébert, le plus curieux ; et Carl-Philippe-Emmanuel, le plus sage, qu’on surnomme Manu parce que c’est plus simple. Alors qu’il pleut depuis maintenant 100 jours, les quatre amis décident de partir vers la montagne bleue, en attendant la fin de la pluie. En chemin, ils feront plusieurs rencontres, dont celle d’Alice, une petite fille qui a le don de grandir ou de rapetisser à volonté. En sa compagnie, les quatre amis vivront une aventure extraordinaire ! Une fête sous la lune . L’extraordinaire voyage de la bande à Bébert  est un conte musical écrit par Christiane Duchesne et Jérôme Minière, avec des illustrations de Marianne Ferrer et dont la narration est assurée par Bruno Marcil. Ariane Moffatt, Salomé Leclerc, Frannie Holder et Michel Rivard accompagnent Jérôme Minière pour les diverses chansons qui parsèment le récit. L’histoire se veut un hommage à Alice au pays des merveilles, avec le prénom de la jeune fille que Bébert et ses amis rencontrent en guise de clin d’œil, comme sa faculté de changer de taille. L’imagination et l’amitié sont au cœur de ce récit empreint d’aventure et de magie. Les illustrations, magnifiques, accompagnent à merveille le texte fantaisiste. La narration de Bruno Marcil est enjouée et dynamique, et les prestations musicales, qui vont des chansons et comptines connues aux compositions originales, s’intègrent au récit de manière fluide et naturelle. Un album à lire à l’heure du coucher, pour faire rêver grands et petits !

Ils symbolisent le début de la puberté chez les filles. En Occident, ils possèdent une charge érotique très forte et sont souvent l’objet du regard masculin, désiré ou non. Parfois, ils peuvent être lourds à porter, que ce soit figurativement ou littéralement. Ce sont les seins et Nathalie Lagacé pose un regard à la fois tendre et critique sur eux dans Le poids des seins, un album qui explore la relation, parfois complexe, que les filles et les femmes entretiennent avec eux. Ce texte poétique est accompagné de magnifiques illustrations, tantôt réalistes tantôt surréalistes. C’est une œuvre forte et essentielle, à faire lire aux adolescents, filles comme garçons.

Qu’est-ce que la justice ? Qui a des droits et quels sont-ils ? Comment maintenir la cohésion sociale et punir les comportements répréhensibles ? Qui dicte les lois ? Ce sont là quelques-unes des questions qui sont abordées par Francesca Trop, dans Ces grands procès qui ont changé le monde, un documentaire fascinant qui revient sur des causes judiciaires qui ont eu un impact durable sur les sociétés occidentales. Antisémitisme, génocide, apartheid, droits des minorités, plusieurs causes sociales ont été défendues devant les tribunaux par des procureurs, des juges ou de simples citoyens qui se sont levés pour combattre les injustices. Agrémenté de dessins crayonnés, les procès sont remis dans leur contexte historique et un bref commentaire revient sur l’impact de ceux-ci sur les sociétés occidentales et sur certains groupes, comme les juifs, les enfants, les femmes, les esclaves, qui ont dû compter sur les tribunaux pour réaffirmer leurs droits les plus élémentaires. À la fin de cet ouvrage très instructif, on retrouve un glossaire des termes judiciaires ainsi que des peintures réalisées par l’autrice qui illustrent chacun des procès présentés. Un livre étonnant qui suscitera bien des discussions.

Zachary, Camille et Dilkaram sont loin de se douter que leur dernière année à l’école secondaire de la Cité-des-Jeunes sera particulièrement mouvementée. Tout commence avec une vidéo virale où on peut voir un meurtre bestial. Alors que plusieurs parlent d’une fake news, des événements étranges et troublants se déroulent à l’école de la Cité-des-Jeunes. Les trois amis sont témoins de la transformation de l’un de leurs enseignants en un monstre sanguinaire et cannibale et cette métamorphose n’est que le début de leur longue et terrifiante descente aux enfers. Parviendront-ils à sortir vivants de ce cauchemar éveillé ? Rien n’est moins sûr… Marc-André Pilon fait une entrée fracassante dans la littérature d’horreur pour ados avec Infectés T. 1. Cette histoire de zombies nous prend littéralement aux tripes dès les premières pages pour ne jamais relâcher la tension jusqu’à sa conclusion. Les amateurs de zombies, de frissons et de gore seront plus que servis, alors que les morts horribles et sanglantes se multiplient autour du trio qui tente de survivre par tous les moyens à cette terrible épidémie. Mentionnons qu’il est rafraîchissant d’avoir un personnage central issu de la diversité – Dilkaram est Indien – sans que ça ait un rapport direct avec l’intrigue. On termine ce premier tome avec une seule envie : mordre son voisin… euh… se jeter sur le deuxième tome !

Dans la Nouvelle Cité Mondiale, tous les Citoyens travaillent un mois sur deux. L’autre mois, ils sont plongés dans le sommeil, pendant que la personne qui partage leur chambre est réveillée et poursuit ses propres activités. Tout juste âgée de 16 ans, Ysia se réveille en tant que Citoyenne. Elle est donc affectée à la Serre, sous les ordres d’une supérieure qui semble la mépriser. En plus, elle est persuadée que l’un de ses collègues de travail l’épie, sans qu’elle sache pourquoi. Finalement, elle trouve une note énigmatique signée d’une simple initiale dans la chambre qu’elle partage avec quelqu’un d’autre. Qui est « D » et que lui veut ce mystérieux interlocuteur ? Rupture est le premier tome d’une série dystopique pour adolescents signée par Magali Laurent. Celle-ci n’en est pas à ses premières armes en matière de dystopie, et ça se sent. L’écriture est fluide et efficace, alors que l’arrière-monde est présenté de manière très convaincante, tout comme le mode de vie en temps partagé des personnages qui vivent dans la Nouvelle Cité Mondiale. L’autrice s’amuse à semer des indices qui semblent démontrer que tout ne tourne pas rond dans cette société qui se veut idyllique, et Ysia est crédible et attachante, alors qu’elle tente par tous les moyens de comprendre ce qui se passe autour d’elle. Ce premier tome est une mise en bouche d’une redoutable efficacité qui donne envie de suivre la jeune femme, alors qu’elle cherche à percer les secrets du Jardin, à ses risques et périls. Une lecture accrocheuse portée par une plume alerte, à découvrir absolument !