Un coup de cœur au premier regard
Alexie Morin se souviendra toujours du premier texte qu’elle a publié comme codirectrice éditoriale du Quartanier. Ça a été un coup de cœur immédiat. Elle a tout de suite reconnu la voix singulière et affirmée de Stéfanie Clermont, autrice de Le jeu de la musique publié en 2017. « C’était le scénario idéal pour un premier roman, se rappelle-t-elle. C’était merveilleux de tomber là-dessus. Dès la première phrase, dès la première page, je suis tombée en amour avec la profondeur émotionnelle du livre. Elle n’avait recours à aucun lieu commun. » Après toutes ces années, elle peut réaffirmer qu’il s’agissait d’une situation unique.
Pour elle, l’émotion est toujours la porte d’entrée d’un texte. « Il faut que je m’y sente bien, que je sois touchée par les personnages et par l’affect, avoue-t-elle. C’est là que je suis à mon meilleur. J’aime quand un texte est intense, émouvant et bien construit avec une narration complexe. »
Thomas Campbell, éditeur chez Héritage, admet quant à lui avoir un faible pour les autrices et les auteurs qui jouent avec les codes et défient le schéma narratif classique. « Chaque autrice ou auteur a sa signature, son style et sa propre façon d’amener le lecteur dans son univers, ajoute-t-il. Un texte, c’est très personnel. Il faut d’abord entrer en relation avec. »
Œuvrant dans le milieu de l’édition depuis une quinzaine d’années, Thomas Campbell a eu, au fil du temps, l’occasion de créer des liens de confiance avec les autrices et les auteurs avec lesquels il travaille. Si bien qu’il n’hésite pas à se tourner vers elles et eux lorsqu’il crée de nouvelles collections pour les inviter à proposer des textes en lien avec la ligne éditoriale. « Il faut instaurer des balises et avoir une vision d’ensemble de la série. » Cela a notamment été le cas pour les titres d’UNIK, une collection créée en 2020 qui propose des livres où les autrices et les auteurs replongent dans des moments marquants de leur histoire. Il est question, dans chacun des titres, de sujets parfois sensibles comme le racisme, le suicide, la transidentité et l’estime de soi. « Ce sont des récits personnels où l’autrice ou l’auteur revit des moments qui ont parfois été difficiles, explique Thomas Campbell. Ils plongent dans leur vulnérabilité. » Dans un tel contexte, une relation intime se crée forcément entre une autrice ou un auteur et son éditrice ou son éditeur.
Depuis, la famille UNIK ne cesse de grandir. En près de cinq ans, une quinzaine de textes ont été publiés provenant d’autrices et d’auteurs reconnus tels que Samuel Larochelle et Gabrielle Boulianne- Tremblay, ainsi que des récits d’autres personnes, comme Julien Leclerc, qui n’avaient jamais écrit auparavant. « C’est la collection pour laquelle j’ai publié le plus de nouveaux auteurs », avoue l’éditeur. « Une fois qu’une série est bien implantée, il est plus fréquent de recevoir des propositions de textes », explique-t-il.